Mémoire protestante en Pays Royannais

La naissance de la Réforme

La prospérité des protestants inquiète

Cette période de calme ne pouvait durer ; toujours soucieuse de sauvegarder le pouvoir absolu du souverain et inquiet de la prospérité des protestants la royauté revint à la charge pour éradiquer le protestantisme du royaume. En 1628, le siège et la reddition de La Rochelle marquent "le commencement de la fin" pour le protestantisme, l'étouffement à petit feu. Dès 1630, le culte est interdit à Oléron, en 1640 à Arvert : même si ces mesures seront provisoirement suspendues, et ce jusqu'à la date fatidique de 1685, le recul protestant est avéré. La reconquête d'Oléron est déjà faite, l'île n'aura plus de pasteur à demeure et restera sous l'étroite surveillance du pouvoir.

A l'accession au trône de Louis XIV les brimades et privations se multiplient, fermant aux protestants dès 1665 les fonctions de sages‑femmes, médecins, imprimeurs, capitaines, avocats, leur interdisant de sortir les bateaux de sel de la Seudre, permettant aux enfants de se convertir à la religion catholique dès l'âge de 7 ans... Louis XIV va atteindre le sommet de la prétention au pouvoir absolu et de la centralisation. La mémoire collective garde vivante l'intensification et l'amplification de la répression dès 1685 : conversions forcées, fuites à l'étranger, destruction des temples, dragonnades.

Certains intendants, prélats et prêtres s'efforçaient de mettre fin à ces pratiques qui ne faisaient que renforcer la résistance des huguenots et les conduire à des fausses conversions, voire à la tentation de la violence. L'un d'eux écrivait qu'en obligeant des gens à confesser faussement la foi catholique, on les contraignait au blasphème et qu'au lieu d'être sauvés, ils étaient au contraire plus sûrement damnés ! Il se trouvaient des curés pour délivrer de faux certificats de mariage, soit par humanité, soit pour de l'argent. Ils encouraient des peines sévères tel Louis Montfort, curé d'Annezay, condamné le 19 novembre 1746, marqué au fer rouge et envoyé aux galères à perpétuité.

Le prêche en mer

Dans ce sombre tableau, les Îles de Saintonge apparaissent comme longtemps épargnées. Terres de recrutement des marins du roi, les côtes de Saintonge seront ménagées jusqu'au dernier moment. D'autre part, les larges ouvertures sur l'océan, dont la Seudre, mieux encore qu'aujourd'hui reliée à la mer, constituent des points d'embarquement pour les nombreux protestants du Poitou, du centre, et bien sûr de Saintonge qui choisiront l'exil. C'est la population la plus humble, celle qui n'a pas les moyens de s'enfuir, qui gardera vivants les foyers du protestantisme aux assemblées du désert, à Plordonnier, Breuillet, par exemple, ou dans les marais, Arthouan, Saint‑Just. Ce pays des îles sera aussi le premier à construire des maisons d'oraison appelées souvent temples‑granges. L’ancien temple d'Avallon à Arvet (désaffecté depuis) en est un vestige.

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Sources documentaires

Bibliographie

  • P. Boismorand, F. Bossy et D. Vatinel : "Protestants d'Aunis, Saintonge et Angoumois". Éditions Le Croît vif, 1998.
  • Guy Binot : "Histoire de Royan et de la Presqu'île d'Arvert". Éditions Le Croît vif, 1994.
  • Collectif : "Histoire des protestants charentais" (Aunis, Saintonge, Angoumois). Éditions Le Croît vif, 2001.
  • Collectif : "Le Patrimoine des Communes de la Charente‑Maritime". Éditions FLOHIC, 2002.
  • Cahiers de la Maison du Protestantisme Charentais n°2, année 2000.
  • Archives départementales de Charente‑Maritime.
  • Recueil de la Commission des Arts et Monuments Historiques de la Charente Inférieure 1902.

Remerciements

  • Monsieur Denis Vatinel, pasteur de Royan
  • Monsieur Bernard Tastet et Monsieur Claude Goulevant, de la Société d'Archéologie et d'Histoire de Saintonge Maritime.
  • Monsieur Jacques Daniel pour la carte ancienne de l'embouchure de la Seudre.
  • Et les nombreux amis qui ont bien voulu nous faire profiter de leurs connaissances.

 

Les temples

Après la révocation de l'édit de Nantes, aucun temple n'avait échappé à la destruction. Au début du XIXe siècle, la communauté protestante reconstruit ses lieux de culte. Sur le pourtour de la Communauté d'Agglomération Royan Atlantique, à partir de La Tremblade, du nord vers le sud côté Seudre, on découvre un temple presque dans chaque commune.

temple
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Temple

Breuillet

Temple

Chaillevette

Temple

Cozes

Temple

Étaules

Temple, démoli

La Tremblade

Temple

La Tremblade

Temple, vestiges

Les Mathes - La Palmyre

Temple protestant

L’Éguille-sur-Seudre

Temple

Médis

Temple protestant

Meschers-sur-Gironde

Temple protestant

Mornac-sur-Seudre

Temple

Mortagne-sur-Gironde

Temple

Saint-Augustin

Temple

Saint-Georges-de-Didonne

Temple

Saint-Palais-sur-Mer

Temple

Saint-Sulpice-de-Royan

Temple

Saujon

Temple

Vaux-sur-Mer

Les maisons de prière

Le pasteur Louis Gibert a exercé son ministère dans la clandestinité de 1751 à 1761. À partir de 1755, profitant d'une tolérance de fait, il ouvre en Saintonge une trentaine de maisons d'oraison, des granges spécialement construites ou aménagées pour le culte. Certaines de ces maisons seront fermées ou détruites par les autorités civiles, mais peu à peu l'usage s'établit de laisser les protestants y célébrer leurs offices. Ces "maisons d’oraison" sont situées à l'écart des bourgs et des voies de communication ; elles n'ont aucun signe distinctif extérieur. À l'intérieur le mobilier se compose d'une chaire, d'une table de communion et de bancs.

Les propriétés affectées à des œuvres sociales

propriété affectée à des œuvres sociales
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Les cimetières familiaux

Notre campagne abrite çà et là des cimetières privés, témoins des guerres de Religion et de leurs conséquences. Suite à l’édit de Nantes, les protestants ont le droit d’avoir des cimetières publics dans chaque lieu où leur culte était célébré.

Mais, à la Révocation, ces cimetières, tout comme les temples, sont rasés. Le clergé refuse aux réformés de se faire inhumer en "terre sainte et bénie" et ils doivent se faire ensevelir dans des terrains privés.

À la Révolution, selon l’article 15 de la loi du 23 prairial an XII, il est décidé que : "chaque culte doit avoir un lieu d’inhumation particulier et, dans les cas où il n’y aurait qu’un seul cimetière, on le partagera par des murs, haies ou fossés, en autant de parties qu’il y a de cultes différents, avec une entrée particulière pour chacune...".

Les protestants avaient donc accès aux cimetières communaux mais certaines familles gardèrent l’habitude de se faire enterrer sur leurs terres.

cimetière familial
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Le Gisant

Saint-Augustin

La Maison du protestantisme charentais

Créée en 1994 pour sauvegarder la mémoire du protestantisme en Aunis, Saintonge et Angoumois, cette association dispose d'une importante collection de costumes, mobilier, bijoux, objets familiers propres aux protestants ainsi que des archives de familles. Ces collections datent des XVIIIe, XIXe et XXe siècles.

La Maison du Protestantisme inventorie également les cimetières et les tombes.

Maison de l'histoire du protestantisme charentais (MHPC)
19, rue du bourg - 17530 Arvert
Site web

Moule à méreau de l'église réformée de La Tremblade (XVIIe siècle).
Collection : Maison de l'Histoire du Protestantisme Charentais © MHPC

Le méreau est une sorte de "bon pour", un signe de reconnaissance ou encore, un laisser‑passer qui prend la forme la plus commune d'un jeton en plomb ou étain. Les méreaux existent depuis le Moyen Âge.

Au temps de Calvin, les anciens d’une église protestante les distribuaient aux fidèles qui étaient dignes de communier à la Cène. Ce qui explique la représentation fréquente de la coupe et du pain sur une face. Au temps des Assemblées du "Désert", ils serviront à admettre sans crainte les assistants inconnus et ainsi éloigner les espions potentiels.

Les moules à méreau qui ont pu être conservés, sont fort peu nombreux. En effet, ils étaient le plus souvent en pierre laquelle a éclaté sous l’effet de la chaleur. Certains étaient en métal et ont mieux résisté au temps.

La Maison du protestantisme charentais a la chance de posséder celui qui a permis de fabriquer les méreaux dits "de La Tremblade". Il est en cuivre et en parfait état de fonctionnement. De plus, la référence du verset qui est "32" dans l’évangile de Luc devient "82" , selon la gravure. Cette "heureuse erreur" permet donc de le distinguer au milieu des nombreux méreaux dits : bordelais.

Source : Maison de l'histoire du protestantisme charentais (MHPC)